Théorie de l'omelette

Théorie de l'omelette

MANAGER A DISTANCE : LA THEORIE DE L’OMELETTE

 

Ou comment favoriser l’autonomie de ses collaborateurs en acceptant le droit à l’erreur

 

La situation sanitaire à laquelle nous faisons face depuis maintenant 8 mois implique pour beaucoup de managers une remise en question de leur posture managériale. En effet, le télétravail qui devient la norme les pousse à prendre conscience que l’on ne manage pas de la même marnière à distance qu’en présentiel. En jeu : la notion de « contrôle » qui devient nettement plus délicate en distanciel promouvant de fait une certaine forme d’autonomie entre le manager et son collaborateur. C’est parce que la situation impose de nouveau le télétravail à 100% et donc cette autonomie que cette posture du manager à distance peut s’avérer difficile à gérer pour certains. Alors, plutôt que de la subir, nous vous proposons au travers cet article de partager quelques pistes de réflexion pour vous permettre d’y voir plus clair.

Pour avancer sur le sujet, intéressons-nous d’abord à la notion d’autonomie. L’autonomie, comme le précise la définition, consiste au fait de donner à son collaborateur la possibilité d’agir librement. Bien évidemment et pour éviter toute dérive, nous pondèrerons cette définition en précisant que l’autonomie d’un collaborateur doit se structurer dans un cadre fixé à la fois par l’entreprise (règlement intérieur) et par le manager. Dès lors, il est important de noter que favoriser l’autonomie passera obligatoirement par une capacité du manager à la réfléchir dans un cadre structurant qu’il se devra de mettre en place.

Intéressons-nous maintenant à la notion d’erreur. L’erreur, même si elle est souvent constitutive d’un processus d’apprentissage pour peu qu’elle ne soit pas reproduite, est souvent perçue comme négative. Dans le milieu de l’entreprise, la tolérance à l’erreur qu’un manager peut accepter de ses collaborateurs est souvent une source de stress importante au vu des impacts qu’elle peut générer. Aujourd’hui, l’avènement du travail à distance amène certains managers à développer un sentiment de « perte » de contrôle vis-à-vis de leurs collaborateurs qui ne fait que décupler ce stress. Dès lors, chez ces managers, c’est la course au contrôle avec un objectif : limiter encore plus le nombre d’erreurs ou à minima leurs impacts. Ainsi, la multiplication des points, la sur abondance de tableurs Excel de suivi et dans certains cas, la bonne vieille méthode de « faire à la place » prend le pas sur l’autonomie. Alors que cette stratégie du « tout contrôle » ne garantit pas forcement l’atteinte de l’objectif précisé plus haut, elle contribue le plus souvent à l’inverse à empêcher la prise d’initiative et la créativité quand on sait pour autant tous les bienfaits que cela peut générer.

Il est également important de distinguer deux types d’erreurs : celles dites subjectives et celles dites objectives le tout dépendant du cadre qui vont les régir ou pas. Ainsi, on pourra considérer que de ne pas respecter un process, un timing, une demande à partir du moment où elle a été précisée explicitement relève de l’erreur objective. A l’inverse, dès lors qu’un cadre ne vient pas préciser le contexte alors, on pourra parler d’erreur subjective. Cette erreur subjective, parce qu’elle laisse libre court à toute interprétation, est un piège dans lequel tout manager gagnerait à ne pas tomber. Dès lors, pour éviter toute ambiguïté, il est donc primordial pour un manager de bien fixer le cadre et donc les règles de cette autonomie.

Questions à se poser :

  • POURQUOI et POUR QUOI favoriser l’autonomie de mon collaborateur ?

Donner du sens à votre action en vous posant la question de ce qui vous pousse à le faire mais aussi de ce que vous en attendez pour vous, votre collaborateur et l’équipe. Cette réflexion vous permettra de fixer les grands contours du cadre que vous donnerez à cette démarche. La situation actuelle qui impose le travail à distance et donc de fait cette autonomie, répondra à la question du Pourquoi. C’est pour cette raison que je vous invite surtout à vous poser la question du Pour Quoi.

  • Mon collaborateur le VEUT-IL ? le PEUT-IL ?

Favoriser l’autonomie d’un collaborateur qui ne la recherche pas ne s’appréhende pas de la même manière de celui qui la souhaite. De même, accompagner l’autonomie d’une personne sans expérience s’appréhendera également différemment de celle qui en est pourvue. Toute la question résidera dans votre habilité à positionner le collaborateur par rapport à ces réponses pour adapter le cadre de cette autonomie.

  • QUEL CADRE va structurer cette autonomie ?

Au final et comme vu précédemment, l’autonomie n’empêche pas le contrôle…au contraire. Il s’agira donc, en vous appuyant sur les réflexions précédentes, de fixer le cadre de départ à savoir les règles et les attendus qui, étape par étape viendront structurer cette autonomie. En fonction, ces règles seront plus ou moins cadrantes et évolueront car l’autonomie ne se gagnera pas en 2 jours et pourra également passer par des retours en arrière.

Nous avons précédemment abordé la notion d’erreur mais arrêtons-nous maintenant sur celle de droit à l’erreur. Au premier abord, parler de droit à l’erreur notamment dans le milieu de l’entreprise peut paraitre incongru mais soyons honnêtes : qui n’a jamais fait d’erreur ? Rappelons-nous également que certaines découvertes l’ont été grâce à des erreurs dont l’exemple le plus notable reste la tarte tatin. Alors évidemment, parce que l’objectif de cet article n’est en aucun cas d’en faire l’apologie, Il est important de prendre du recul sur cette notion. En effet, l’idée n’est pas d’accepter l’erreur comme si c’était un droit en tant que tel. L’idée serait plutôt de mettre en condition son collaborateur et sois même dans un état d’esprit ou l’erreur ne serait pas considérée comme une fin en soi. Ainsi, à l’image du processus d’apprentissage, elle constituerait une étape permettant d’atteindre l’objectif commun fixé : « Pour Quoi favoriser l’autonomie ? ». De fait, cette autonomie « gagnante gagnante » ne pourra s’exprimer que si et seulement si le manager et le collaborateur ont mis en évidence ce qu’ils ont à y gagner à la fois individuellement mais aussi collectivement. Par exemple, en tant que manager, favoriser l’autonomie de mon collaborateur c’est me permettre de gagner du temps pour développer d’autres choses. En tant que collaborateur, c’est gagner en responsabilité donc en crédibilité. L’association de ces bienfaits permettra au collectif de se tirer vers le haut.

Cependant, dans certaines situations, malgré le fait d’avoir donné du sens à cette démarche et malgré la bonne volonté de chacun, tout cela n’est pas toujours suffisant. En effet, certaines fois, il s’avère que pour le manager ou le collaborateur, accepter le droit à l’erreur induit des freins limitants voir bloquants qui les empêchent au final de promouvoir cette autonomie. En effet, accepter le droit à l’erreur c’est, au-delà de l’erreur elle-même, accepter d’être faillible et potentiellement, de se sentir dévalorisé. Accepter le droit à l’erreur cela peut également être d’accepter de décevoir des gens que nous apprécions. Au final, derrière l’erreur et sa dimension rationnelle se cache deux dimensions qui amplifieront le stress qu’elle peut générer à savoir les réactions cognitives et émotionnelles qui lui sont liés.

Je vous propose maintenant d’investiguer ces dimensions en vous posant les questions ci-dessous.

  • Qu’est ce qui se passe quand je fais une erreur ?
  • Qu’est-ce que je me dis quand je fais une erreur ?
  • En quoi est ce grave quand je fais une erreur ?
  • Qu’est-ce que je ressens quand je fais une erreur ?
  • De quoi ai-je besoin pour me sentir mieux quand je fais une erreur ?

Bien évidemment, je vous invite également à vous poser les mêmes questions pour votre collaborateur :

  • Qu’est ce qui se passe quand mon collaborateur fait une erreur ?
  • Qu’est-ce que je me dis quand mon collaborateur fait une erreur ?
  • En quoi est ce grave quand mon collaborateur fait une erreur ?
  • Qu’est-ce que je ressens quand mon collaborateur fait une erreur ?
  • De quoi ai-je besoin pour me sentir mieux quand mon collaborateur fait une erreur ?

J’aimerais finir par un parallèle avec le judo. Une des bases de l’enseignement de ce sport réside dans le fait d’apprendre non pas à ne pas tomber mais à bien tomber. De fait, je vous invite en tant que manager à vivre cette posture du management à distance et cette quête d’autonomie en réfléchissant à ce point : plutôt que de vouloir tout faire pour éviter l’erreur, pourquoi n’essayerez-vous pas de les accepter et accompagner vos collaborateurs à en faire une source d’apprentissage au service de cette quête d’autonomie ? D’ailleurs, comme le dit si bien le dicton « J’ai tellement appris de mes erreurs que j’envisage d’en faire encore quelques-unes ».

Alors, comme : « on ne fait pas d’omelettes sans casser des œufs »…. je vous souhaite de faire encore beaucoup d’omelettes.

Fabrice Putois – Coach Interne

 

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