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La théorie de l’Iceberg

La théorie de l’Iceberg

La théorie de l’Iceberg

 

Les icebergs | Espace des sciences

 

De nombreuses publications inondent les réseaux sociaux sur les thèmes du management. Celles-ci, quand elles ne visent pas à nous faire devenir le parfait manager en 5 étapes, posent à minima des pistes de réflexions qui ont le mérite de nous faire avancer dans cette quête. En ces temps où tout doit aller vite, qui dit réflexion dit souvent frustration pour le lecteur qui aimerait logiquement repartir avec des réponses plutôt qu’avec des questions. Pour autant, Confucius disait : « Je ne cherche pas à connaitre les réponses, je cherche à comprendre les questions ». Dès lors, c’est parce que la question est souvent plus importante que la réponse que je vous propose au travers cet article de mettre un coup de projecteur sur le questionnement souvent galvaudé mais pourtant essentiel en management notamment.

Alors oui, désolé mais vous aurez compris en lisant ces premières lignes que cet article ne vous donnera pas de réponses toutes faites. Tout du moins, il vous donnera des pistes de réflexions pour mieux penser et discerner votre questionnement, axe essentiel dans l’appréhension de sa posture managériale. En effet, l’affirmation de celle-ci passe notamment par des phases de questionnements qui accompagneront votre progression sur ce chemin d’apprentissage. Comme le disait Albert Einstein : « Apprendre d'hier, vivre aujourd'hui, espérer pour demain. L'important est de ne pas arrêter de poser des questions ». Disons-le clairement, un manager qui ne s’en poserait pas serait un peu comme un navigateur sans moyens d’orientation. Comme un GPS qui le localise et lui permet de tracer son cap en fonction d’un objectif, le questionnement du manager lui permet de se recentrer sur le sens (Pourquoi ? / d’où je pars ?) et d’identifier son cap qui lui permettra de construire sa vision (Pour quoi ? / Ou je vais ?). Dès lors, la question des moyens à mettre en œuvre pour y arriver viendra naturellement structurer ce parcours vers l’objectif fixé. Questionner, c’est accepter de larguer les amarres, de hisser les voiles, de prendre la barre et de répondre à l’appel du large avec une conviction : vous êtes le capitaine. En d’autres termes, questionner c’est éviter d’activer par défaut le mode pilote automatique car, s’il peut être rassurant voir nécessaire dans certains cas, il peut vite devenir un piège quand le temps se gâte. L’appel du large est attirant mais gare aux tempêtes. 

A l’ère des algorithmes, notre monde moderne nous enseigne aujourd’hui qu’au vu des moyens technologiques que nous avons à notre disposition nous nous posons de moins en moins de questions et paradoxalement, nous attendons de plus en plus de réponses. Pourtant, n’oublions pas que pour avoir une réponse il nous faut nécessairement une question. Le philosophe Edgar Morin disait à cet effet : « À la doctrine qui répond à tout, plutôt la complexité qui pose question à tout. ». En effet, dans un monde aussi complexe que celui du travail, le manager se doit, avant de réfléchir aux réponses, d’accepter et d’apprendre à se poser des questions. Se questionner est une chose mais, qu’il soit pertinent en est une autre. Pour reprendre Platon: « Si l'on interroge bien les hommes, en posant bien les questions, ils découvrent d'eux-mêmes la vérité sur chaque chose. ». 

Tel un iceberg, notre questionnement s’articule la plupart du temps autour d’une situation que nous observons de notre propre prisme et de notre propre cadre de référence (la partie émergée). Pour autant, comme le disait Epictète : « Ce qui trouble les hommes ce ne sont pas les choses mais les représentations qu’ils en fabriquent. » Posons-nous donc la question de savoir si notre questionnement permet également d’investiguer et confronter ces « représentations » (la partie immergée) nous permettant in fine d’appréhender cette même situation de manière plus globale et plus objective ? 

Se pose la « grande » question de savoir s’il y aurait de bonnes ou de mauvaises questions ? Existerait-il cette fameuse question « puissante » ou « magique » que certains spécialistes de l’accompagnement, à trop vouloir la trouver, en oublient la base : l’écoute. Si je reste sur le souvenir de cette phrase que me disaient bon nombre de mes professeurs à l’époque : « il n’y a pas de bonnes ou de mauvaises questions » la réponse semblerait toute trouvée. Pourtant, la réponse est plus complexe. Prétendre qu’il y aurait des bonnes et des mauvaises questions peut être critiquable. En effet, qui sommes-nous pour juger de nos propres questions et plus encore de celles des autres ? A partir du moment où vous vous en posez, dites-vous qu’elles méritent toute votre attention. En revanche, la question se pose de la pertinence de celles-ci et c’est là toute la différence. En effet, une question ne peut être réduite à une vision manichéenne comme si l’on distribuait des bons et des mauvais points. Une question ne peut s’appréhender de manière binaire car, au vu du monde du travail d’aujourd’hui, elle doit s’intégrer dans une globalité complexe. A l’image d’un iceberg, cette complexité génère un cheminement entre une partie émergée d’une problématique et ça partie immergée. Cette dernière est souvent plus difficile à appréhender et pour autant reste indispensable à investiguer. Ainsi ce cheminement nécessite souvent l’élaboration d’un questionnement. La question devient alors, une prise qui vous permettra d’avancer avec l’idée que chaque réponse vous permettra de faire progresser votre questionnement et d’approfondir cette fameuse partie immergée de votre problématique. En fonction de la taille de l’iceberg, donc de la problématique, il vous faudra plus ou moins de questions pour l’investiguer. De même, Il s’agira certaines fois de savoir si vous êtes tout simplement sur la bonne voie et s’il n’y avait pas l’intérêt de prendre du recul sur votre questionnement pour l’orienter vers une autre. Ainsi, au lieu de se poser simplement la question de savoir comment je vais faire pour me séparer de mon collaborateur, il serait pertinent de pousser le questionnement et l’orienter en réfléchissant à ce que j’aurais pu faire en tant que manager pour le garder ? Cette deuxième question aurait le mérite de provoquer une remise en cause et poser les actions à mettre en place pour éviter probablement de reproduire le même schéma avec son remplaçant. Pour autant, cette question peut déranger.

La complexité des hommes et des organisations nécessite souvent d’aller au-delà de la question qui parait la plus évidente pour avancer. Cette question que j’appellerais « question explicite » se doit souvent d’être complétée par des questions transverses que j’appellerais « questions implicites ». Pour reprendre notre « iceberg », un questionnement pertinent est finalement celui qui vous aidera à éviter de rester au niveau de la partie émergée de votre problématique pour investiguer celle immergée et appréhender de fait la problématique dans sa globalité. 

Comme nous l’avons vu, une question peut déranger. A cet effet, un point important pour assurer un questionnement pertinent consiste à accueillir les questions telles qu’elles viennent en écoutant les ressentis qu’elles provoquent. Il n’est pas rare que lorsque nous nous posons des questions, des ressentis très forts viennent dans certains cas parasiter ce questionnement au point certaines fois de le stopper. Ce n’est pas tant la question que la réponse que nous anticipons inconsciemment qui enclenche cela. L’objectif pour les questions qui provoqueront ces ressentis désagréables est d’éviter de les juger. En les jugeant, vous justifiez le fait de les mettre de côté ou de foncer tête baisser pour trouver la réponse à tout prix. Accepter de ne pas juger votre question, c’est accepter d’accueillir l’émotion qui vient quand vous vous la posez. Cette émotion qui lui est liée a tout autant à vous dire que la réponse et souvent, vous guide vers celle-ci. Dans certains cas, nous nous posons une multitude de questions sur un même sujet au point certaines fois de tourner en rond. Dans ce cas, cette sorte de fuite pour éviter de nous arrêter ou de trouver la question qui sera la plus pertinente s’explique par le fait que celle-ci est souvent celle qui génère les ressentis les plus désagréables.  Dans d’autres cas, nous ne nous posons aucune question. Cette autre forme de fuite s’explique par le fait qu’éviter de se poser des questions nous permet vous l’aurez compris, d’éviter de nous confronter à ces ressentis désagréables. A cet effet, l’expression « La question qui tue » symbolise bien l’importance qu’elle a tout en soulignant l’impact émotionnel dérangeant qu’elle peut générer.  

Au final, un questionnement pertinent est un questionnement en conscience. En conscience que certaines fois l’exercice impliquera d’écouter, d’accueillir et d’accepter de se confronter à ses émotions désagréables (peurs, colère, tristesse…). Ce même ressenti désagréable qui nous empêche parfois de nous questionner ou tout du moins de le faire de manière pertinente est pourtant l’indicateur qui vous aidera à poser cette question implicite essentielle : « pourquoi cette question génère chez moi cette émotion ? ». La réponse à cette question mettra en évidence un besoin qui posera les bases de votre réponse. 

Au travers cette posture, vous pourrez faire ce travail d’accueil et être plus au clair avec votre questionnement. Bien évidemment, au-delà de celui-ci, la sagesse voudra dans un dernier temps qu’après avoir confronté à la réalité des faits les réponses à vos questions, vous preniez le temps d’en observer les résultats. Je finirai par cette citation du célèbre anthropologue Claude Levi-Strauss qui disait: « Le savant n'est pas l'homme qui fournit les vraies réponses, c'est celui qui pose les vraies questions. » et comme les « vraies » questions sont souvent celles qui dérangent alors ….je ne peux que vous encourager à questionner cette  partie immergée de vos icebergs.

Fabrice Putois

Écrit par : Fabrice Putois

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